Médicaments de la rue à Bamako : le business de tous les superlatifs
Médicaments de la rue, pharmacie par terre ou « yala yala foura », les médicaments vendus clandestinement à Bamako n’ont pas fini de nous livrer tout leur secret. Ça soigne ; ça tue mais ça fait aussi beaucoup d’argent. Le business des médicaments de la rue a de beaux jours devant lui. Grossistes véreux ; pharmaciens sans scrupule ou consommateurs inconscients, à qui profite le crime ?
La vente illicite de médicaments est une activité clandestine de commerce de produits pharmaceutiques, sans distinction aucune. Cette activité est communément appelée vente de médicaments de la rue, pharmacie par terre ou « yala yala foura » en bamamankan. Dans leur très grande majorité, ces médicaments sont des produits de contrefaçon et de mauvaise qualité. En comprimé, sirop, poudre, effervescent, ces médicaments sont sur le marché et ressemblent à tout point de vue à des médicaments authentiques.
A l’origine du « yala yala foura » au Mali
Septembre 1987, les responsables africains en charge de la santé se retrouvent à Bamako à l’initiative de l’OMS. Le colloque qui en suivit déboucha sur le concept « Initiative de Bamako ». Cette initiative vise l’adoption d’une politique de facilité relative aux médicaments essentiels dans les pays africains.
A l’époque, cette politique est considérée comme celle adaptée aux réalités des pays pauvres et sous-développés face à la faiblesse de l’accès aux médicaments ; d’où ce qualificatif de stratégie pour la relance des soins de santé primaires. Et cette stratégie, en soi, tenait à la logique d’une participation accrue des collectivités locales au financement des soins de santé primaires ; avec une part de financement assurée grâce aux revenus générés par le payement des soins médicaux.
En la matière, l’Initiative de Bamako mettait le curseur sur un certain nombre de mesures à satisfaire pour une parfaite disponibilité des médicaments essentiels. Au nombre des mesures, citons entre autres, le coût d’acquisition du médicament ; la mise en place d’un laboratoire de contrôle de qualité ; et le maintien de la Pharmacie Populaire du Mali comme structure de monopole de l’importation des médicaments.
Cependant, des insuffisances notoires ont fortement entamé la bonne application de la politique adoptée au sujet des médicaments de première nécessité. Au nombre de ces insuffisances, le magazine « La lettre hebdomadaire de Politiques Internationales de Santé (PIS) », en 2017, cite : « les contraintes de bureaucratie, de technocratie, de bonne gouvernance ; le faible engagement des Etats à honorer leurs engagements dans le financement de la santé ». Bref, le système était devenu un moyen pour faire payer aux bénéficiaires la plus grande charge du financement de la santé sous le concept de participation communautaire.
Les vendeurs de médicaments hors pharmacie commencent donc à se faire la place dans les marchés avec l’érection des kiosques ou boutiques de détaillants. La population apprécie la facilité d’accès à ces médicaments, le prix à portée de bourse et leur apparente « efficacité », s’il en est réellement une. Les médicaments de la rue ont désormais leur clientèle et plus rien ne pouvait arrêter le phénomène.
L’Etat fait semblant de lutter. Il met en avant la loi N° 86-36/AN-RM d’avril 1986, portant institution de l’Ordre des pharmaciens ; et crée une commission nationale de lutte contre la vente illicite des médicaments. Cette commission est composée de douaniers, policiers, économistes, l’ordre des pharmaciens, société civile, l’administration, et élus municipaux. Au-delà de quelques activités de sensibilisation comme l’organisation d’une semaine de lutte contre la vente illicite des médicaments en mai 2009 et mai 2010 à Bamako, la structure n’a réellement existé que de nom, nous apprend un pharmacien à la retraite à Bamako qui a voulu rester anonyme.
Le commerce clandestin de médicaments est en terrain favorable
Dans sa thèse de doctorat soutenue en 2013 sur la Problématique de la vente illicite des médicaments en commune II du district de Bamako, l’étudiant Halidou Salihou Maiga écrit : « Le développement extraordinaire et la mondialisation des échanges commerciaux ont contribué à l’essor de ce secteur. Partout en Afrique, des réseaux de distribution et de vente de ces médicaments se sont installés et ont prospéré au vu et au su des pouvoirs publics».
Aussi, sanofi.com, le site web de la firme pharmaceutique SANOFI, regrette « que ce commerce très lucratif a été facilité par le développement d’Internet, qui est devenu le vecteur privilégié pour les contrefacteurs de médicaments ».
Mondialisation et développement de l’internet font qu’aujourd’hui l’on retrouve sur le marché africain, particulièrement dans le secteur informel, des médicaments provenant de partout à travers le monde. Les deux pays producteurs cités dans ce trafic sont le Nigéria, la Chine et l’Inde. L’Inde est le pays qui fournit la plus grande quantité des médicaments vendus au Mali. Le Togo, Bénin et la Côte d’Ivoire sont les trois pays de transit des médicaments avant d’arriver au Mali.
Exceptionnellement, des grands pays européens sont cités dans ce trafic. Dans un article paru en juillet 2020, BBC Afrique donne la parole à Bob Van den Berghe, un expert rattaché à l’unité spéciale des Nations-Unies pour aider les Etats à lutter contre les réseaux criminels. Cet expert a déclaré que dans un port d’Afrique de l’Ouest, en début de l’année 2020, 81 kg de produits pharmaceutiques d’origine suisse et brésilienne ont été découverts dans un conteneur étiqueté comme transportant des “boîtes de dons humanitaires”. Curieusement, ce conteneur avait été expédié de France a-t-il précisé.
L’unité spéciale des Nations-Unies contre les réseaux criminels est une force conjointe de l’Office des Nations-Unies contre la drogue et le crime et l’Organisation mondiale des douanes. Comme ceux vendus dans les pharmacies, ces médicaments qui se vendent dans les rues sont aussi fabriqués dans des laboratoires mais à des indications scientifiques très peu fiables. A la différence des premiers, qui remplissent toutes les conditions et normes de transport et de conservation, les seconds sont entrés de façon frauduleuse en violation de toutes les normes exigées.
Dans un document de travail sur le secteur privé de la santé au Mali en 2011, la Banque mondiale précise que le médicament par terre s’est développé depuis les années 90. L’institution onusienne ajoute qu’en 2008 au Mali, le médicament par terre était estimé à environ 15 % de la consommation de médicaments modernes, soit environ dix (10) milliards de F CFA.
Aussi, précise le même rapport d’étude : « ce marché privé illicite est présent sur l’ensemble du territoire et concerne toutes les catégories de médicaments ». Qu’il s’agisse des spécialités, génériques, voire les médicaments avec ou sans autorisation de mise sur le marché, tout y passe.
Pis, la Banque mondiale affirme qu’au Mali, le marché des médicaments de la rue prospère parce qu’il donne plus de facilité d’accès aux médicaments à des prix moins élevés. Et surtout, le marché bénéficie de complicités à un degré si haut que l’institution financière mondiale cite les commerçants, les fonctionnaires, les professionnels de la santé et les personnalités influentes du pays.
Mieux, la Banque mondiale finit par dire que les acteurs de la filière pharmaceutique, publique comme privée, participent parfois à ce marché illicite. Car des officines s’approvisionnent auprès du médicament par terre ou écoulent des stocks de médicaments à des grossistes sans activité officielle connue.
Vendeurs clandestins et leurs médicaments
Une étude transversale descriptive sur la problématique de la vente des médicaments de la rue dans trois marchés de la ville de Bamako, à savoir le grand marché, le rail da et Dabanani, nous en dit un peu plus sur la typologie des vendeurs et leurs médicaments. Cette étude date de juillet 2012 à novembre 2012. L’étude précise : « En somme, 65 vendeurs de médicaments ont été enquêtés sur leur profil, leur niveau de connaissances sur les médicaments vendus et sur certains noms locaux attribués à ces produits. La majorité était de sexe masculin 78 %. Seulement 7,6 % des vendeurs avaient un niveau secondaire tandis que 43% étaient non scolarisés ».
Dans la même étude, nous apprenons que 72,3 % des vendeurs trouvent que leurs clients sont satisfaits alors que dans 81,5 % des cas, les vendeurs n’avaient reçu aucune formation sur la vente des médicaments. L’étude ajoute que le médicament était directement choisi par les clients dans 66,2 % des cas. Pour 33,8 % des cas, l’acheteur demande des informations auprès du vendeur. L’étude conclut que les médicaments de la rue sont vendus sans conseils pertinents. Et que malgré tout, le marché véhicule des médicaments qui sont accessibles à la population.
Dans sa thèse de doctorat sur le thème : « Problématique de la vente des médicaments au Mali. Cas de la Commune périphérique de Kalaban-Coro », l’étudiant Mahamadou Dabou Traoré de la faculté de Faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odonto-Stomatologie, explique la dénomination des médicaments auprès des vendeurs et consommateurs. Il écrit que les médicaments sont tout simplement nommés dans les langues locales (en bambara et autres langues). La dénomination est intimement liée aux explications que donnent les populations à leur propre maladie. Par exemple, précise l’étudiant Traoré, « konodimi fura » veut dire médicament contre les maux de ventre ; « sumaya fura » égale antipaludéen, « nyèdimi fura » égale médicament contre les maux d’œil, etc.
Pis, des molécules sont désignées par la couleur des comprimés ou des gélules. Par exemple pour désigner les antibiotiques comme la tétracycline et l’amoxicilline, aussi bien le vendeur que l’acheteur en grande majorité, parlent de « kunbléni » (kun comme tête et bléni pour dire rouge); ainsi de suite. Pour d’autres médicaments, ils sont décrits suivant leur consistance ou de leur transformation dans l’eau. C’est le cas « djiwili » pour dire comprimé effervescent (dji veut dire eau et wili illustre le bouillonnement ou l’effervescence).
Le business à trois ?
Selon la Fédération internationale de l’industrie du médicament (FIIM), un investissement de 1 000 dollars peut générer 500 000 dollars de profits. Cela rendrait les faux médicaments plus rentables que la plupart des stupéfiants. Au Mali, le commerce illégal de médicament pose la problématique d’un business à trois. Le vendeur clandestin, le pharmacien professionnel et le grossiste (pharmacie populaire du Mali), ces trois entités sont au cœur de cette nébuleuse. Pour en savoir plus, nous nous sommes intéressés au marché Dabanani, à la pharmacie populaire du Mali et des pharmacies vues comme des grosses pointures de l’activité de la vente de médicament au Mali.
O.S. est vendeur-grossiste des médicaments de la rue. Il est établi au grand marché de Bamako, précisément au marché appelé « Dabanani ». L’homme a la cinquantaine, visiblement aisé et l’air très sûr de lui. « J’ai un magasin bien dissimulé ici au Dabanani mais j’ai plusieurs autres lieux de stockage de mes médocs à Bamako, Sikasso et à Ségou, en 3ème et 4ème régions du Mali » nous dit-il.
Il est si bien à l’aise que le vendeur illicite n’hésite pas à nous dire qu’il contribue à la stabilité du pays et que son « industrie » emploie plus de 100 personnes, directement et indirectement. Sur la quantité et la provenance de son stock de médicaments, O.S. est moins bavard. Il dit : « Nous en avons des centaines, voire des milliers de cartons de médocs entreposés ici à Bamako, à Sikasso et Ségou. Pour nous, l’essentiel est d’avoir la marchandise, la provenance importe peu ».
Nous insistons sur la provenance des médicaments. O.S. ajoute : « Nous sommes à Sikasso parce que c’est près de la Côte d’ivoire. A Ségou, pour être plus prêt du Burkina Faso et à Bamako parce que nous recevons des cartons de médicaments estampillés du logo d’un très gros distributeur de notre pays. Aussi, à Bamako, nous avons beaucoup plus de revendeurs en détails et de clients de toutes catégories ».
Tiens, tiens ! « ..des cartons de médicaments estampillés du logo d’un très gros distributeur de notre pays ». C’est la piste qui nous mène à la pharmacie populaire du Mali (PPM). La PPM, structure nationale en charge du médicament n’est pas encline à parler. Cependant, un haut cadre de la structure accepte d’échanger avec nous à distance.
Sur la question des cartons estampillés, notre interlocuteur précise : « vous savez, pas plus tard que l’année passée, nous avons découvert dans des magasins à Bamako, plusieurs cartons de médicaments portant le logo de la pharmacie populaire du Mali. Il reste entendu que ce sont des faux médicaments et des faux logos fabriqués par les trafiquants. Ici à la Pharmacie populaire, notre structuration ne permet pas que des cartons sortent du stockage sans être tracés. Nous avons vérifié et c’était tous des contrefaits ».
Dans la foulée, il ajoute : « Ma responsabilité ici à la pharmacie populaire fait que j’ai toute une vue sur le mouvement des camions et des médicaments. C’est pourquoi, je vais te dire que même nos camions ont été piratés. En 2020, nous avons été appelés pour un cas portant sur un camion avec le logo PPM (Pharmacie Populaire du Mali). Après vérification, le camion était un faux. L’affaire a été transmise à la police et à la justice par notre service juridique ». Sur la question, les pharmaciens regrettent la faiblesse de l’Etat mais dénoncent une complicité passive de l’Etat.
Markatiè Daou, anciennement chargé de communication au ministère de la santé et de l’hygiène publique de 2015 à 2021, rejette l’idée d’un passage des faux médicaments via la voie normale. Il dit : « il est très difficile de faire passer des faux médicaments dans le lot de ceux de la pharmacie populaire. Tous les médicaments mis sur le marché sont soumis à l’Arrêté interministériel n° 05-2203 / MS-MEP-SG du 20 septembre 2005 ; déterminant les modalités de demande des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments à usage humain et vétérinaire ».
Trade Portal Mali est le site web pour la promotion du commerce et l’investissement au Mali. Il écrit : « Les médicaments doivent bénéficier de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) afin de pouvoir être importés au Mali. Elle est valable 5 ans. Le dossier d’enregistrement comprend notamment le numéro de l’inscription à l’ordre des pharmaciens de l’opérateur, la décision l’autorisant à exercer, et le dossier de fabrication du médicament (fabricant, pays de provenance, société, autorité qui a autorisé la fabrication, informations sur le médicament). Après analyse, lorsque le dossier est complet, le chef de la division réglementation donne un “certificat de dossier administratif complet de demande AMM”. Une fiche de paiement est délivrée pour AMM à l’usager pour qu’il paye au représentant du trésor à la Direction de la Pharmacie. A l’interne, un agent analyse la demande et produit une note technique à l’attention de la Commission Nationale AMM qui se réunit 4 fois dans l’année (session trimestrielle). L’opérateur obtient son autorisation après la réunion de la commission ».
Les Pharmaciens n’en démordent pas
Dans sa parution du 12 Février 2019, le journal « Le Pays » rapporte le témoignage du pharmacien, Dr Togola Mahamadou :« Selon lui, ces médicaments dits de la rue n’entrent pas par autre voie au Mali si ce n’est que celle empruntée par tout le monde, terrestre. Tout ça pour dire que les autorités sont complices de ce trafic. Pour soutenir ses propos, Dr Togola citera beaucoup d’exemples d’arrestations où seulement deux jours ont suffi à certains vendeurs pour reprendre leur commerce comme si de rien n’était, et cela au vu de tout le monde ».
Le Dr Seydina AS Diakité de l’ordre des pharmaciens du Mali s’indigne : « l’Etat fait très peu pour lutter contre cette pratique. Pourtant, les vendeurs de médicaments de la rue s’enrichissent indûment. Nul d’entre eux ne paie de taxes ni d’impôts. Plus de 400 pharmacies sont dans l’attente d’autorisation officielle d’ouverture. Au même moment, des individus sans la moindre formation, remplissent les boutiques de médicaments au vu et su de l’Etat du Mali ».
Contactez par nos soins, le responsable de la division Législation et Concurrence à la direction générale du commerce, de la consommation et de la concurrence, met en avant son impuissance face au commerce du médicament de la rue. Selon le cadre de la direction générale du commerce, cette mission demande des moyens humains, matériels adéquats et financiers. Le tout à hauteur du combat à mener. Il ajoute que la mission de lutter contre la vente illicite des médicaments est une mission aussi dangereuse qui demande un certain savoir-faire et une protection des agents de terrain. Malheureusement, cela n’est pas le cas au Mali, a-t-il dit. Les agents de contrôle sont taxés d’être corrompus, avons-nous lancé à notre interlocuteur. Réponse : « Cela n’est pas exclu. Les trafiquants ont de gros moyens ; nos agents sont dans des situations difficiles. La corruption est possible mais je ne saurai vous le confirmer ».
Le vendeur ambulant dans son rôle
Adiaratou est vendeuse de médicaments de la rue. Elle justifie son commerce qui, dit-elle, a le mérite de faciliter la prise en charge des soins de santé. « Nos médicaments sont les mêmes que ceux de la pharmacie. Nos prix sont plus raisonnables que ceux appliqués par les pharmaciens. Et nous offrons un soin rapide sans ordonnance. Les Maliens aiment ça », dit-elle.
Pour Issa Sissoko, enseignant de son état, les faits sont graves mais c’est un mal devenu nécessaire. Malgré les facilités accordées par l’assurance maladie, les médicaments de la rue sont entrés dans nos mœurs. « Plus facile d’accès, efficaces, identiques aux produits de la pharmacie, ces médicaments nous soignent en tout cas. Rien ne prouve que ce n’est pas les mêmes que ceux que nous achetons avec les pharmaciens », conclu-t-il.
Faux vaccin Covid-19 à craindre
Des faits similaires ont été enregistrés dans d’autres pays africains, voire européens. En Ouganda, au mois de juillet 2021, l’agence AFP a révélé que quelques 800 personnes ont reçu une ou des injections de faux vaccins contre la Covid-19. En août 2021, en France, une enquête a été ouverte suite à la plainte d’un médecin dont le profil avait été utilisé sur le site de l’Assurance maladie pour professionnels de santé, afin d’éditer 55 faux certificats de vaccin, a révélé le journal Paris Match.
Selon l’Agence de presse Turque « Anadolu », ce sont environ 2400 doses de faux vaccins qui ont été saisies en Afrique du sud en mars 2021. Un autre réseau de vaccins contrefaits a été découvert en Chine au même moment, révèle Interpol dans un communiqué. Ces cas suffisent pour dire que notre pays n’est pas à l’abri d’une escroquerie aux faux vaccins. 1,4 millions, c’est le nombre de doses de vaccin contre la Covid 19 que le Mali doit recevoir dans le cadre de la facilité COVAX.
Pourtant, les vaccins sont là mais les Maliens ne se bousculent pas. En plus de la crainte d’éventuels effets secondaires, les citoyens s’interrogent sur la netteté des vaccins. Quelque part, on pense que c’est du faux tout ça. Et ce discours a des oreilles attentives au Mali. Au centre national de santé publique, l’assurance est de mise. Impossible d’avoir de faux vaccins au Mali, nous précise le Dr Abdelaye KEITA.
Face à notre interrogation, le Dr KEITA, biologiste et chef de division à l’Institut National de la Santé Publique, pense que : « Pour le vaccin Covid-19 au Mali, nous pouvons dire qu’il est difficile d’avoir du faux sauf si le donateur nous donne du faux. Généralement, le vaccin vient directement de la firme avec son certificat de conformité jusqu’au centre national d’immunisation. A ce niveau, impossible d’avoir du faux sauf si quelqu’un de mal intentionné n’introduit le système. Cela est possible avec la complicité du personnel. C’est le seul moyen d’avoir du faux sinon c’est pratiquement impossible ».
La volonté politique seul remède à ce mal
116 000, c’est le nombre de décès par an causés par les seuls médicaments antipaludéens falsifiés et non conformes aux normes, rien qu’en Afrique subsaharienne, selon les experts des nations unies. La Banque mondiale, dans son rapport d’étude sur le secteur privé de la santé au Mali en 2011, précise que le médicament est un outil de promotion de la santé en général, mais également de prévention et de lutte contre les maladies. Si sa qualité, son efficacité et sa sécurité ne sont pas garanties, c’est toute une politique nationale qui est compromise. Cela pour dire que la lutte contre les trafiquants et autres vendeurs illicites de médicaments doit être sous tendue par un vrai engagement politique.
A cet effet, dans un document intitulé « Contribution à la mise en place d’une base de données sur les médicaments de la rue au Mali », l’Union technique de la mutualité malienne enfonce le clou : « l’élimination du marché illicite des médicaments exige un véritable engagement politique au-delà des discours. Mais il nécessite d’informer les consommateurs sur la composition de ces produits. De ce fait tous les moyens sont utiles pour y parvenir ». Cela nous amène à poser la problématique de la criminalisation effective de ce commerce illicite comme c’est déjà le cas au Togo.
Pour lutter contre le phénomène, cet État de notre sous-région a modifié son code pénal depuis 2015. Dans le nouveau code pénal, le commerce illicite de médicaments au Togo est punissable de vingt ans de prison et de 50 millions de francs CFA d’amende. Cette nouvelle donne est- elle arrivée à bout du phénomène ? Rien n’est moins sûr !
Enquête réalisée par Seybou KEITA avec l’appui de la Cellule Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation en Afrique de l’Ouest (CENOZO)